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L’économie pâtit des crises politiques à répétition que le pays connaît depuis la dissolution de l’Assemblée nationale, le 9 juin 2024 qui a mis le pays dans un état d’incertitude permanente.

Inquiets, les Français épargnent toujours plus au détriment de la consommation. Les chefs d’entreprises y regardent à deux fois avant d’investir, hésitent à embaucher. Selon le Baromètre Rexecode-Bpifrance les chefs d’entreprises interrogés déclarent à 76 % prévoir de reporter ou d’annuler certains projets d’investissement contre 60 % avant l’annonce de Monsieur Bayrou de solliciter un vote de confiance.

De quoi laisser craindre une reprise largement compromise.

Les faits marquants de l’été

Dans sa publication de rentrée, Athermys a souhaité faire le point sur les conséquences de l’évolution du mode de calcul du DPE qui entrera en vigueur le 1er janvier prochain et revenir en détail sur les décrets et arrêtés publiés au J.O. avant la chute du gouvernement Bayrou qui concernent le dispositif MaPrimeRénov’, la TVA réduite sur certains types de panneaux solaires et les bonus CEE accordés aux pompes à chaleur.

Enfin Athermys attire votre attention sur une longue étude publiée par l’Observatoire National de la rénovation énergétique qui vise à évaluer l’évolution de la consommation réelle de gaz et d’électricité à la suite de la réalisation de travaux d’isolation dans les maisons individuelles ayant bénéficié d’une aide financière : une première.

Bonne lecture et bonne rentrée.

 

 

Le secteur du bâtiment reste en crise

Lors de sa conférence de presse de rentrée la FFB table sur une troisième année de recul de l’activité du secteur à -3,4 % en volume. Depuis la fin 2022, la chute cumulée s’établirait alors à – 9,5 %.

Pour Olivier Salleron, le secteur reste en crise même si le logement neuf semble demeurer en phase de redressement.

Pour le reste, l’activité du non résidentiel poursuit sa lente dégradation et plus inquiétant le secteur de la rénovation s’installe dans le rouge avec un repli de 0,8 % alors qu’à fin mars les indicateurs laissaient entrevoir une modeste croissance de 0,6 % en volume. Et de pointer du doigt la succession de rabotages et de gels de MaPrimeRénov’ et, dans une moindre mesure, des primes CEE qui pèsent lourdement dans ce retournement de tendance. Pour la FFB, le principal combat des prochains mois portera donc sur la reprise du marché ce qui passe notamment par une certaine stabilité politique.

Même bilan du côté de la CAPEB où son Président Jean-Christophe Repon déplore lui aussi la chute de l’activité et de l’emploi.

Au cours du second trimestre 2025, l’activité des artisans en volume a encore baissé de 4,5 %. Ceci après une réduction de 5 % de l’activité globale en volume au 1er trimestre 2025 et de 6 % au quatrième trimestre 2024. Les entreprises artisanales du secteur ont vu leurs effectifs salariés reculer de 3,4 % sur un an au 1er trimestre 2025, soit 28 300 emplois supprimés. Les perspectives sur l’emploi restent défavorables : les intentions de licenciement et de non-renouvellement des contrats (12 %) dépassent les intentions de recrutement (7 %).

Cette chute d’activité et d’emploi s’inscrit dans un contexte aggravant où les signaux envoyés par les pouvoirs publics sont négatifs. Aucune mesure forte n’est venue soutenir la rénovation énergétique des logements. Au contraire, le Gouvernement a décidé début juin de suspendre le dispositif Parcours accompagné MaPrimeRénov’, privant brusquement les ménages et les artisans d’un soutien financier crucial aux travaux. Et, depuis le 2 septembre, exit désormais les aides pour l’isolation des murs intérieurs et extérieurs. Cette isolation, dans le cadre des rénovations par geste simple, c’était pourtant l’un des premiers postes de travaux demandés. Seule l’isolation des combles et des sols reste subventionnée.

Une dynamique de masse doit impérativement être engagée, souligne la Capeb, au bénéfice de l’ensemble de la filière : industriels, distributeurs, artisans et clients.

Evolution du mode de calcul du DPE

L’arrêté du 13 août 2025, publié le 26 août 2025, modifie le coefficient de conversion de l’énergie finale en énergie primaire de l’électricité du DPE.

Il entrera en vigueur le 1er janvier 2026. À compter de cette date et afin de s’aligner sur la valeur par défaut européenne, le CEP diminuera, passant de 2,3 à 1,9, dans les DPE et les audits énergétiques.

Avant cette date, l’arrêté prévoit la possibilité de télécharger gratuitement une attestation de changement d’étiquette pour les anciens DPE et audits concernés, via l’observatoire de l’ADEME et sans nouvelle visite d’un diagnostiqueur.

Petite évolution, grands effets

Si pour Matignon cette évolution entant « mieux refléter la réalité du mix énergétique français, largement décarbonné » l’impact sera immédiat et conséquent puisqu’il va faire sortir environ 85.000 logements du statut de passoires thermiques et permettre à des milliers de propriétaires bailleurs de conserver leurs biens sur le marché locatif au détriment des locataires de logements souvent précaires.

A ce sujet une quinzaine d’organisations dont Famille de France, l’USF-Que Choisir, NegaWatt, France Nature Environnement, Agir pour le climat ont dans une lettre ouverture alerté le premier Ministre (F. Bayrou) sur le risque de voir revenir en masse les convecteurs électriques au détriment des pompes à chaleur « puisse que ces derniers, bien moins chers à l’achat, pourront suffire à attendre un DPE conforme à la location ».

Pour sa part, la CAPEB évoque « une sortie artificielle du statut de passoire thermique ; Des rénovations a minima, sans prise en compte de la performance réelle des équipements et du bâti ; Des chantiers en moins pour les entreprises artisanales du bâtiment qui subissent déjà un fort repli de leur activité ».

Une chose est sûre : cette réforme du DPE entérine une nouvelle baisse des ambitions en matière de rénovation thermique

Une énième refonte de MaPrimeRénov’ mais le flou persiste quant à sa pérennisation

Malgré un nouveau décret et deux arrêtés qui redessinent le nouveau contour du dispositif MaPrimeRénov’ le flou persiste sur le financement du dispositif et, par voie de conséquence sa pérennisation.

Le point sur la situation actuelle

Alors que la réouverture du guichet dédié aux opérations d’ampleur est attendue au 30 septembre, seul un nombre limité de dossiers pourra être traité d’ici à la fin de l’année. Ce nombre est fixé à 13.000. Selon le ministère, des objectifs ont été assignés par région et la plateforme de dépôt fermera quand le nombre maximum de dossiers sera atteint avant une réouverture complète en 2026.

Attention toutefois, les dossiers déposés entre le 1er octobre et le 31 décembre 2025 ne seront instruits qu’en 2026.

Tout cela étant par ailleurs suspendu au vote de la loi de finance.

Le décret 2025-959

Le décret du 8 septembre fait évoluer les conditions d’éligibilité de l’aide MaPrimeRénov’ :

il recentre le « Parcours accompagné » sur les logements ayant une classe énergétique avant travaux comprise entre E à G et supprime, en conséquence, le bonus dit « sortie de passoire énergétique » ;

il prolonge l’accès au parcours « par geste » pour les maisons individuelles classées « F » et « G » jusqu’au 31 décembre 2026 en France métropolitaine et lève jusqu’à cette même date l’obligation de réaliser un geste de chauffage éligible à la prime pour accéder au parcours par geste ;

il supprime les forfaits correspondants aux chaudières biomasse et aux travaux d’isolation des murs des dépenses éligibles du parcours « par geste » à partir du 1er janvier 2026.

Les dispositions de ce décret entrent en vigueur le 30 septembre 2025, à l’exception des dispositions du IV de son article 1er qui entrent en vigueur le 1er janvier 2026. Elles s’appliquent aux demandes de primes déposées à compter de ces mêmes dates.

Deux arrêtés relatifs aux conditions d’attribution des aides et des critères techniques du parcours accompagné

Ce décret est accompagné d’un premier arrêté qui fait évoluer les conditions d’attribution des aides du parcours accompagné de MaPrimeRénov’ pour les ménages aux ressources intermédiaires et supérieures. Il met en œuvre les évolutions suivantes :

baisse des plafonds de dépense éligible à 30.000 euros pour les projets permettant un gain de deux classes et 40.000 euros pour les projets permettant un gain de trois classes ou plus ;

suppression du bonus dit de « sortie de passoire énergétique » ;

fixation d’un taux de subvention unique de 45 % pour les ménages aux ressources intermédiaires et de 10 % pour les ménages aux ressources supérieures quel que soit le gain de classes atteint au terme du projet.

Il acte également les évolutions suivant sur le parcours « par geste » :

– report au 1er janvier 2027 de l’obligation de fournir un diagnostic de performance énergétique en France métropolitaine ;

– suppression des forfaits correspondant aux chaudières biomasse et aux travaux d’isolation des murs à partir du 1er janvier 2026.

Enfin, il offre la possibilité aux ménages le souhaitant de joindre à leur dossier une attestation justifiant de la classe énergétique de leur logement avant et après travaux, conformément au nouveau facteur de conversion de l’énergie finale en énergie primaire de l’électricité. Les classes figurant dans cette attestation se substituent à celles initialement présentes dans l’audit énergétique ou le DPE.

Un second arrêté adapte les critères techniques du parcours accompagné de MaPrimeRénov’ en cohérence avec les évolutions entrant en vigueur le 30 septembre 2025.

– Il abroge le critère de faible déperdition thermique, dit « Ubat », pour les travaux de rénovation d’ampleur conduisant à des gains d’au moins quatre classes énergétiques et il adapte les attestions de travaux.

– En raison de la suppression des forfaits correspondants aux travaux d’isolation des murs de MaPrimeRénov’ « par geste », les critères techniques relatifs à ces travaux sont abrogés pour ce dispositif.

– Par mesure de clarification, ces critères techniques sont repris pour le dispositif de l’éco-prêt à taux zéro, dont les travaux éligibles sont inchangés.

 

TVA à 5,5 % pour certaines installations photovoltaïques

Le Journal Officiel a publié le 8 septembre 2025 l’arrêté instaurant une TVA réduite à 5,5 % pour certaines installations photovoltaïques résidentielles.

Cette mesure, applicable dès le 1er octobre, constitue un signal fort en faveur de la transition énergétique et vise à rendre le solaire plus accessible aux particuliers.

Pourtant, derrière cette avancée, plusieurs zones d’ombre persistent. En particulier, les conditions techniques et environnementales fixées par l’arrêté sont strictes, et l’installation doit obligatoirement intégrer un système gestionnaire d’énergie (EMS) pour piloter l’autoconsommation.

UNE MESURE CIBLÉE SUR LES PETITES INSTALLATIONS

L’arrêté fixe clairement le cadre : la TVA à 5,5 % s’applique aux projets photovoltaïques d’une puissance inférieure à 9 kWc.

L’objectif est de soutenir le marché résidentiel, considéré comme un levier clé pour l’autonomie énergétique des ménages et la croissance de la filière solaire française.

Le gouvernement insiste sur la double finalité de cette disposition : stimuler la demande des particuliers et renforcer la compétitivité industrielle d’un secteur stratégique pour l’emploi et l’innovation.

DES CRITÈRES D’ÉLIGIBILITÉ TRES RESTRICTIFS

Malgré cet avantage fiscal, les professionnels alertent sur une limite majeure : la définition des modules éligibles est particulièrement stricte. Selon Enerplan, « très peu de panneaux disponibles aujourd’hui sur le marché pourront bénéficier de ce taux réduit ».

En effet, l’arrêté impose des critères techniques et environnementaux exigeants :

– un bilan carbone ≤ 530 kg CO-eq/kWc,

– une teneur en argent ≤ 14 mg/W,

– une teneur en cadmium ≤ 0,01 % masse,

– une teneur en plomb ≤ 0,1 % masse (sauf dérogations prévues par la directive RoHS).

– la présence d’un système gestionnaire d’énergie (EMS) capable de collecter en temps réel la production et la consommation pour piloter les usages et maximiser l’autoconsommation.

Ces conditions, qui visent à favoriser des panneaux à faible impact environnemental, excluent de fait une large partie de l’offre actuellement disponible sur le marché. Ils disqualifient ainsi tous les panneaux solaires d’origine chinoise, dominants sur le marché.

Les acteurs redoutent que ce manque de flexibilité réduise considérablement l’impact attendu de la mesure et crée de la confusion chez les particuliers.

Bonus sur les CEE pour les pompes à chaleur

L’arrêté du 6 septembre révise les fiches d’opérations standardisées BAR-TH-171 « Pompe à chaleur de type air/eau » et BAR-TH-172 « Pompe à chaleur de type eau/eau ou sol/eau » pour les opérations engagées à compter du 1er octobre 2025.

Il précise que l’installation de ces systèmes de chauffage doit couvrir la totalité des besoins de chauffage des surfaces chauffées du logement. Toute association avec un autre système, en particulier solaire, entraîne une non-conformité lors du contrôle et le rejet de la demande de CEE.

Par ailleurs, les bonifications applicables à ces fiches sont ajustées et exprimées en fonction d’un coefficient multiplicateur, et il n’est plus prévu de montant minimal d’incitation financière. Le coefficient de bonification applicable à ces fiches sera × 5 pour les opérations engagées à compter du 1er octobre 2025 et jusqu’au 31 décembre 2030.

Ce bonus est étendu à tous les ménages, indépendamment de leurs niveaux de revenus. La seule condition pour bénéficier d’une bonification est de remplir les critères techniques de la fiche.

Attention toutefois, le présent arrêté exclut les résidences secondaires de la bonification.

L’arrêté fixe également différentes bonifications pour d’autres fiches CEE :

Coefficient x 5 pour les fiches BAR-TH-178 et BAR-TH-162 lorsque le système géothermique installé vient en remplacement d’une chaudière au charbon, au fioul ou au gaz;

Coefficient x 4 pour les fiches BAR-TH-180 et  BAT-TH-164 lorsque la PAC installée de type eau/eau ou eau glycolée/eau vient en remplacement d’une chaudière au charbon, au fioul ou au gaz;

Coefficient x 3 pour les fiches BAR-TH-179 et BAT-TH-163 lorsque la pompe à chaleur installée de type air/eau vient en remplacement d’une chaudière au charbon, au fioul ou au gaz.

Effets de l'isolation thermique des logements sur la consommation réelle d'énergie en résidentielle

Au moment où les aides pour l’isolation des murs intérieurs et extérieurs sont exclus du dispositif MaPrimeRénov’ par geste, Athermys attire votre attention sur une étude, publiée en juillet dernier, conduite par l’Observatoire national de la rénovation qui vise à évaluer l’évolution de la consommation réelle de gaz et d’électricité à la suite de la réalisation de travaux d’isolation dans les maisons individuelles ayant bénéficié d’une aide financière.

BREF Résumé

En France, le secteur résidentiel représente un quart de la consommation finale d’énergie. La rénovation énergétique des logements constitue donc un enjeu majeur des politiques de sobriété énergétique. Pourtant, les économies d’énergie réelles permises par les travaux de rénovation énergétique restent peu documentées. Cette étude évalue l’impact des travaux d’isolation thermique réalisés dans les maisons individuelles sur la consommation réelle d’électricité et de gaz, à partir de données issues de compteurs communicants (Linky, Gazpar).

En exploitant une variation temporelle de la consommation trimestrielle avant et après travaux, l’étude révèle une baisse moyenne de 5,4 % de la consommation globale d’électricité pour les logements chauffés à l’électricité et de 8,9 % pour le gaz pour les logements chauffés au gaz.

Ces effets sont hétérogènes : les logements ayant une consommation énergétique élevée avant travaux présentent des économies d’énergie plus élevées, jusqu’à 16,6 % pour le gaz. Toutefois, ces économies demeurent inférieures aux gains estimés par les modèles théoriques, confirmant l’existence d’un energy performance gap. Nos résultats soulignent l’importance de prendre en compte l’hétérogénéité des comportements et des situations pour mieux cibler les politiques publiques de rénovation.